,
procédé raffiné également présent chez Léo Ferré. La rime de l'intérieur du mot (« mon-» rimant avec « vision ») est une astuce particulière, qu'on trouve souvent chez Brassens. Dans ces vers courts (6 ou 4 syllabes), la technicité de la rime est exigeante : il est plus difficile de rimer toutes les 4 syllabes que toutes les 12 syllabes d'un alexandrin ,
Gainsbourg ne saurait être décrit ici avec justesse -il est à son comble dans les chansons de L'homme à tête de chou, comme l'exquisement scabreux « Variations sur Marilou » ou l'infiniment subtil « Marilou sous la neige ». Mon propos ici est moins général : je donnerai un exemple de chanson où la rime n'est pas seulement maîtrisée et inventive, mais encore se met au service du processus d'écho profanateur dont je me suis attachée à ,
et l'homme -amant lassé -qui la reçoit et la lit à voix haute en commentant de manière sardonique l'orthographe de la missive : comme dans « Les p'tits papiers », c'est la rencontre alternée et conflictuelle d'un discours sentimental au premier degré et d'un commentaire décalé et ironisant. Comme dans « Les p'tits papiers » aussi, le commentaire détruit par l'ironisation la valeur du discours commenté. Comme dans « Les p'tits papiers », la rime fait un pont sonore et un pont de sens entre le texte sentimental commenté et le texte ironique du commentateur. Cependant, cette fois-ci, la relation amoureuse est explicitement trahie. « Les p'tits papiers » était ironique, « En relisant ta lettre » est cynique : « Pour me garder » -« Ne prend qu'un d ! » d'erreur » -Là, y en a une « J'en mourrirai, la rime vient ainsi intensifier la distance terrible entre les deux narrateurs de la chanson : la femme auteur d'une lettre désespérée et vindicative, après une rupture amoureuse ,
, Les deux niveaux établis dans cette chanson entre le sentiment et sa profanation reposent une fois de plus sur la différence vocale entre eux (comme dans « Les p'tits papiers » et dans « Ford Mustang ») ; on peut aussi penser à l'ironisation du refrain de « La Marseillaise » par l'intervention contrastante des I Three chantant « Aux armes, et caetera » en alternance avec la voix parlée de Gainsbourg récitant le texte de l'hymne national français) : ici voix chantée, liée, aérée et aiguë pour le fil plaintif de la lettre amoureuse, voix parlée, timbrée et grave, sur des interventions plus courtes, pour sa lacération sarcastique. Conclusion On trouve chez Gainsbourg une singulière abondance de procédés de retours sur le mode de l'écho profanateur. Cela affecte les sons musicaux (redites, symétries mélodiques et harmoniques, dialogues de voix) ; les sons verbaux (onomatopées dupliquées, travail sur la rime qui conjoint -dans «, Cette transcription montre le schéma rimique régulier mais complexe de ce texte
, et les dispositifs de la narration ou de la création (imitation, ensemencement, transformation par la redite -« Aux armes etcaetera »), jusque dans le plagiat -Gainsbourg percussions. Cette singularité forme un élément de style qui traverse l'ensemble de l, 1980.
, On peut se demander si ce n'est pas une espèce de généralisation de la structuration en appels et réponses : ce procédé musical pourrait revêtir un sens esthétique particulier, dans une chanson française en état de tension vis-à-vis du rock, d'importation encore récente et fracassante. Car dans les années 1960, le call and response pouvait être perçu par les musiciens comme quelque chose de propre aux musiques de « l
, Une autre en est le couple du proxénète derrière la tapineuse : à plusieurs reprises en interview, Gainsbourg assimile ses chansons, ou ses interprètes féminines, voire parfois lui-même, à des prostituées, tandis que l'auteur serait le proxénète