Unité d’action et style démographique. La population fictionnelle des romans grecs
Résumé
En 1999, lors d’une intervention au colloque « Les personnages du roman grec », Georges Molinié esquissait un programme d’études sémiotiques sur la population fictionnelle des romans grecs d’époque impériale. Il concluait cependant de l’impraticabilité de ce programme : on ne saurait, expliquait-t-il, analyser avec profit la description et la caractérisation des personnages du roman grec, « purs actants » vides et interchangeables. Cette communication se propose de relever le défi par le biais d’un changement de méthode. Plutôt que nous intéresser aux personnages individuels et à leur description, nous envisagerons les personnages de ces romans comme une collectivité, dans la perspective de l’approche démographique et de la notion de « style démographique », élaborée par Françoise Lavocat (2020). Nous nous proposons donc d’étudier les effets sur la démographie romanesque de l’unité d’action, contrainte que ces textes respectent de manière exemplaire selon les XVIe (Amyot 1547, Scaliger 1561) et le XVIIe (Scudéry 1641, Huet 1670) siècles français. Le canon des 5 romans grecs complets dits idéalistes (Callirhoé, Les Ephésiaques, Daphnis et Chloé, Leucippé et Clitophon, Les Ethiopiques) sera l’objet principal de l’étude. Dans un premier temps, il s’agira de vérifier si la cohésion générique de ces romans se reflète dans un style démographique unitaire. Ensuite, nous nous demanderons si l’unité d’action entraîne une réduction du nombre total de personnages, ou seulement de certaines catégories. Enfin, nous étudierons ses répercussions sur la structuration démographique des textes (genre, taux de mortalité…). À plus long terme, le style démographique du roman grec pourra être comparé avec celui d’autres romans qui en ont recueilli l’héritage (roman baroque) ou concurrencé le modèle (roman de chevalerie).