Chacun son Horace. Appropriations et adaptations du modèle horatien en Europe (XVe-XVIIe s.)
Résumé
La réception des auteurs classiques est toujours multiple. Elle donne lieu à des lectures
diversifiées et à des usages éditoriaux distincts. Cette pluralité des lectures vaut peut-être plus
encore pour Horace. C'est qu'à la différence de Virgile qui n'était pas théoricien ou d'Aristote
qui n'était pas poète, Horace offre à la fois une théorie et une pratique, et que celles-ci
cultivent l’ambiguïté, sinon la contradiction. C'est aussi sans doute qu'Horace est sensible,
comme poète et comme théoricien, à la variété, à la différence et au droit de l'appropriation.
C'est enfin peut-être que ses textes permettent, loin de tout système et par morceaux épars, de
mettre au premier plan des questions essentielles, littéraires, linguistiques et sociales, sur
l'autorité de l'usage, la portée de l'innovation, la relation au modèle, questions qui ne cessent
d'occuper la première Modernité.
Aussi selon les milieux, les options poétiques, les générations, chacun s'accapare
Horace et s'en réclame, l'accommode à ses propres idées, la plasticité du texte horatien
permettant ces adaptations concurrentes ou successives. Dans l'Europe du début de l'époque
moderne, parmi les commentateurs ou les poètes humanistes, les praticiens et les théoriciens
des différents vernaculaires, chacun a « son » Horace, lyrique ou satirique, grave ou comique,
chantre de la propriété ou du langage figuré, pourvoyeur de concepts ou bien de modèles
d’écriture, qu'il lit à sa guise et parfois (souvent) contre d'autres.