'Quiete' et 'furore', les temps de la création artistique dans les lettres de Giorgio Vasari
Résumé
Le récit que, dans ses lettres, Giorgio Vasari nous livre à propos de son expérience biographique et de sa pratique d’artiste est un terrain privilégié pour réfléchir aux bouleversements dans la conception des temporalités au XVIe siècle, notamment dans la notion du présent. Dès ses lettres de jeunesse, Vasari exploite souvent le topos de la quiete, l’aspiration à une quiétude d’ascendance stoïcienne et pétrarquienne, loin des ennuis de la vie courtisane et des transactions du quotidien. Par cette isotopie, Vasari fait en réalité allusion à une véritable catégorie phénoménologique de la temporalité : à savoir une dimension hors-temps, détachée des contingences de la sphère sociale, donc propice au libre accomplissement de l’acte créateur. Cette quiétude favorable au métier d’artiste entretiendrait ainsi un rapport d’homologie sous-jacente avec un autre topos lié à la création et fort récurrent dans les Vies : le furore, la fureur créatrice de l’artiste. D’ascendance néoplatonicienne, ce concept est privé de son caractère transcendant chez Vasari et serait à entendre comme une catégorie relevant de l’immédiateté : la même immédiateté qui caractérise le geste prompt et instantané de l'artiste, lorsqu’il esquisse sur la feuille la première ébauche de l’œuvre imaginée. Chez Vasari fureur et quiétude apparaissent comme étant indissociables, car, sans la tranquillité de vie qu’assure la seconde, la première ne saurait se manifester au mieux
